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Ensemble neuverBand à l’Abri (Genève, 29 octobre 2015)
Virginie Borgeaud
Jeudi 29 octobre dernier, l’ensemble bâlois de musique contemporaine neuverBand se produisait à la Fondation l’Abri à Genève avec la dernière partie de son cycle de concerts « n3 ». Organisée autour du chiffre trois, cette série de représentations a pour particularité de programmer uniquement des trios dont trois sont des créations. Cette fois-ci, il s’agissait des œuvres Drei Lyrische Stücke de Balz Trümpy, String trio d’Aaron Einbond et Quintessence de Hyun-Hwa Cho. Le concert débute avec une interprétation très convaincante de The Riot, pièce très énergique et virtuose de Jonathan Harvey. Les jeunes musiciens surmontent en effet la difficulté principale de cette œuvre en rendant audible chaque thème et ses particularités propres et cela même lorsque ceux-ci sont combinés les uns avec les autres. La balance sonore entre les trois instrumentistes est idéale bien qu’on souhaiterait par moment une présence plus marquée du piano. Le pianiste se rattrape cependant dans un solo dont les vagues de notes rapides ne semblent jamais vouloir s’éteindre. C’est ensuite au tour de la clarinettiste de nous surprendre brutalement avec l’arrivée de son solo, véritable anticlimax de la pièce, puisque la musique y est réduite au seul bruit du souffle de la musicienne et donc à son strict minimum. Effet clairement réussi ! NeuverBand enchaine avec Am Horizont de Wolfgang Rihm. Le titre de la pièce, « À l’horizon », soit à la limite entre terre et ciel, préfigure très bien cette « stille Szene » qui explore les registres extrêmes et la notion de lointain. Ce jeu spatial s’étend même à la disposition des musiciens sur la scène que le compositeur précise avec soin : le violon et le violoncelle se placent respectivement aux extrémités gauches et droites de la salle tandis que l’accordéon est censé se placer au milieu tout au fond. De ce fait, le choix des interprètes de disposer l’accordéon au milieu de la scène, dos au public peut surprendre. Cependant, au vu du peu de profondeur de la salle de l’Abri, cette astuce s’est révélée particulièrement brillante et a ainsi permis de rendre la sensation de lointaine provenance du son que désire le compositeur. Cette exécution a été une des plus réussies. Une des principales qualités de l’ensemble neuverBand est sans doute sa capacité à passer d’une atmosphère à une autre. Les musiciens en apportent encore une fois la preuve dans les œuvres Aer de Beat Furrer, Formas de Arena de Martin Matalon et « a söchtener reuter möcht i wern » de Matthias Kranebitter. Le souffle continu et pianississimo de la clarinette dans Aer, les rythmes métalliques de la harpe dans le deuxième mouvement de Formas de Arena, le balancement qui fait tanguer l’auditeur dans le quatrième mouvement de cette même pièce et les bruits barbares et sauvages qui caractérisent l’œuvre de Kranebitter sont autant d’univers différents que les jeunes bâlois reproduisent parfaitement et sublimement à travers leur interprétation. Les créations des trois œuvres commandées et composées spécialement pour l’ensemble neuverBand étaient très attendues. Chacune de ces pièces nous propose un monde sonore très différent que les musiciens nous transmettent avec beaucoup d’enthousiasme et de passion. Ainsi, nous sommes transportés par les mélodies quelque peu orientales de l’accordéon, de la harpe et du violon dans les Drei Lyrische Stücke de Trümpy, enivrés par la musique éthérée, colorée par les accents de la musique traditionnelle asiatique dans Quintessence de Hyun-Hwa Cho et décontenancés par les bruitages de String trio d’Aaron Einbond évoquant vraisemblablement le monde sonore de la forêt. Notons pour cette dernière pièce l’usage étrange du violoncelle couché à l’horizontal sur une caisse et considéré comme un instrument percussif.